Publié le 17 novembre 2023 Mis à jour le 1 décembre 2023

Un ouvrage de Liu Na'ou traduit par Marie Laureillard, maîtresse de conférence en langue chinoise.

Le livre
À Shanghai, un homme en prison raconte à son avocat comment il a été tenté de tuer une employée de banque à l’occasion de l’ouverture de son coffre-fort. Une jeune prostituée abandonnée par sa mère se fait offrir une couverture par un client. Une jeune fleuriste se laisse courtiser par un Français avant de lui avouer qu’elle est déjà mariée. Une femme élégante se laisse séduire par un homme au cours d’un voyage en train avant de retrouver… son mari.
Liu Na’ou, non sans ironie, offre un éventail d’aventures libertines, parfois cruelles, dans une ville, le Shanghai des années 1930, où règnent à la fois misère et opulence, volupté et débauche. La modernité de ses thèmes fascine tant ils émanent d’une mégapole cosmopolite qui ressemble à beaucoup de grandes villes d’aujourd’hui. Quant aux relations entre hommes et femmes, la femme y joue un rôle dominant au grand dam d’hommes le plus souvent dupes ou victimes de leurs charmes.
 
 Depuis qu’il avait victorieusement défendu une célèbre mondaine de la société shanghaienne dans une affaire de divorce et qu’il avait critiqué l’attitude pleine de morgue de tous les maris envers leurs femmes, sa réputation grandissait de jour en jour parmi la gent féminine qui se prétendait doublement opprimée. C’est ainsi que son bureau était presque quotidiennement rempli de bruissements de satin, de parfum et d’odeurs de pommade. 
Scène de vie à Shanghai, « Rituels et hygiène », p. 59
 
L'auteur
Liu Na’ou (1905-1940), né à Taiwan, se rend à l’âge de 15 ans au Japon où il fait ses études. Il gagne Shanghai en 1926 pour y étudier le français. Là, il fonde une maison d’édition qui, interdite par le gouvernement nationaliste, est déplacée dans la concession internationale, puis française. Il ouvre une librairie, édite des œuvres japonaises, dont Kawabata, deux revues littéraires d’avant-garde, traduit Paul Morand et publie en 1930 Scènes de la vie à Shanghai.
Dès 1932, il se tourne vers la critique cinématographique, l’écriture de scénarios, dirige la revue Cinéma moderne et produit un film inspiré de La dame aux camélias en 1938. Après la destruction de sa librairie, pendant l’offensive japonaise contre Shanghai, il se réfugie au Japon, puis revient en Chine après le début de la guerre sino-japonaise (1937-1945). Il est assassiné à l’âge de trente-cinq ans, sûrement pour des raisons politiques.
C’est dans la ville de Shanghai que l’écrivain figure de proue de l’école néo-sensationniste, puise toute son inspiration.
Scènes de vie à Shanghai est le premier livre de Liu Na’ou traduit en français.
 
A propos de la traductrice
Marie Laureillard est maîtresse de Conférences en études chinoises à l’Université Lumière Lyon 2 et membre de l’Institut d’Asie orientale. Elle est l’auteure notamment d’Illustrer Shanghai en 1930 : les revues Shanghai Sketch et Modern Sketch. Elle a traduit du chinois romans, nouvelles et poésies, dont Récit de lune de Guo Songfen (Zulma, 2007), Le goût de la pluie de Shi Zhecun (Gallimard, 2011), Le veilleur de nuit de Yu Kwang-chung (Circé, 2020) et Confessions inachevées de Ye Lingfeng traduit pour la première fois en français chez Serge Safran éditeur (2020).

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